C’est l’hystérie autour de #depardieu qui me fait écrire ça, mais comme d’hab dans ces affaires, ça me dépasse et je m’en fiche de savoir qui fait quoi (du moment que justice se fasse à la fin).
Pour l’instant, tout le monde se déchire pour savoir qui est innocent, qui est coupable, etc. On balance aussi que les accusateurs « baffouent la présomption d’innocence ».
Et c’est ça qui me fait bondir.
Imaginons que A accuse B d’un crime. Et que B nie. Peu importe pourquoi, qui, comment, si c’est vrai ou non.
Vous prenez le parti — c’est votre droit — de B, et dîtes à tous ceux qui prennent le parti de A : « et la présomption d’innocence alors ? ». Cela ne revient-il pas à accuser A de menteur ?
Du coup : et la présomption d’innocence du mensonge de A, alors ?
D’un côté vous défendez B des accusations qui pèsent sur lui, de l’autre vous accusez (par insinuation) que A ment ?
Ça ne tient pas, c’est pas logique. Si vous faites ça, vous prenez déjà parti et vos avez déjà fait le procès dans votre tête en considérant l’un coupable et l’autre victime.
Ça c’est une chose.
Une autre chose, c’est que votre avis, on s’en fiche.
C’est pas lui qui détermine l’innocence de quelqu’un avant le procès.
Ce qui détermine l’innocence de A avant le procès, c’est la constitution. Et elle dit que quiconque est innocent avant qu’on ait pu prouver la culpabilité ; aussi que cette culpabilité ne peut être établie qu’au cours d’un procès par un tribunal.
Donc avant le procès, c’est pas compliqué : « A » est innocent. Même s’il a réellement commis le crime, il est innocent à ce stade.
On ne parle d’ailleurs pas de coupable, mais d’accusé (pour un crime, et de prévenu autrement). On ne peut pas non plus parler de « victime » (qui implique que quelqu’un soit coupable), mais uniquement de partie civile.
Votre avis personnel n’est peut-être pas identique, mais ce dernier ne compte pas : on s’en fiche de l’avis de chacun.
Enfin, pour l’instant, on a juste A qui accuse B. La seule donnée qui soit publique, c’est ça. On a juste la parole d’une personne contre une autre.
Avoir un avis sur ça, vous en avez le droit, mais vous avez 1 chance sur 2 qu’il soit contraire à l’avis final du tribunal et surtout 100 % de chances qu’il soit biaisé.
Avant l’enquête et le procès, on est dans un état incertain sur ce qui s’est passé. Qui dit vrai ? Qui ment ? Que s’est-il passé ? Pourquoi l’accusation ? On [le public] ne sait pas.
C’est compliqué « de ne pas savoir », et c’est ça qui pousse à choisir une des parties plutôt qu’une autre en fonction de ses émotions et son ressenti, ou ses propres intérêts. Mais ça ne change rien à l’innocence de quelqu’un tant que le procès n’est pas fait.
Les enquêteurs cherchent la vérité (il n’est pas garanti qu’ils l’obtiennent). Le tribunal tranchera à la fin en fonction des résultats de l’enquête. À partir de là, on pourra éventuellement parler de coupable et de victime.
Notez aussi, et c’est important, qu’un tribunal ne peut juger que d’après les pièces qu’il a. Il peut tout à fait déclarer non-coupable quelqu’un qui a commit le crime, simplement par absence de preuves. Ce n’est pas parce que quelqu’un est acquitté qu’il n’a rien fait. Juste que personne ne peut le prouver. Or ce qui n’est pas prouvé et considéré comme n’ayant pas eu lieu. Et c’est encore à la partie qui accuse (la demande) d’apporter les preuves de l’accusation.
Le tribunal juge les faits dont elle a connaissance, mais ne changera ces derniers (ce qui donne des situations souvent très difficiles pour les personnes qui saisissent le tribunal)
Maintenant peu importe qui vous êtes, ce que vous espérez du tribunal ou de qui vous avez choisie de prendre le parti. La procédure reste la même et la loi aussi.
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